Dans une étude rendue publique fin juin, le Conseil d’État propose de lever les restrictions actuelles en matière de communication et d’information auprès du grand public. Une revendication de longue date portée notamment par les groupements et les enseignes de pharmacies.
Si elles sont adoptées et intégrées dans leurs codes de déontologie, les 15 propositions formulées par le Conseil d’État marqueront un tournant majeur dans l’exercice professionnel des médecins et des pharmaciens. Dans son étude « Règles applicables aux professionnels de santé en matière d’information et de publicité », celui-ci propose en effet de « supprimer l’interdiction générale de la publicité directe ou indirecte et de poser un principe de libre communication des informations par les praticiens au public, sous réserve du respect des règles gouvernant leur exercice professionnel ». Le Conseil d’État prend acte de plusieurs évolutions qui rendent désormais obsolète la réglementation actuelle : l’impact du numérique sur les comportements des individus qui cherchent des informations sur l’offre de soins et la santé en général, sans avoir toujours la garantie de leur pertinence et de leur fiabilité, l’apparition des sites de rating des médecins et des établissements de santé, l’explosion des réseaux sociaux… Autre évolution importante : la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne qui, dans un arrêt récent du 4 mai 2017 dit Vanderboght, a jugé que l’interdiction « générale et absolue » de toute publicité relative à des prestations de soins est contraire au Traité (article 56 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne - TFUE). Des interdictions prévues dans certaines réglementations nationales (c’est le cas en France) et qui sont en contradiction avec la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 dite « commerce électronique », laquelle, dans son article 2, précise que la notion de « communication commerciale », au sens du droit de l’Union, couvre toute forme de communication, y compris celle des professions réglementées. Ce sont donc les dispositions européennes relatives à la publicité par Internet qui fragilisent la réglementation française. Selon l’arrêt Vanderboght, les professionnels de santé exerçant dans les pays de l’Union doivent avoir « la possibilité d’assurer, même de façon très encadrée, la promotion de leur activité. »
Communiquer sur les prestations de soins proposées et leurs tarifs
Quelles informations les professionnels de santé pourraient-il communiquer au grand public ? Le Conseil d’État suggère que cette communication puisse porter sur les tarifs des actes et les honoraires de consultation, la formation professionnelle continue suivie par les professionnels de santé (DPC), leurs spécialités ou « sur-spécialités » (les pratiques avancées des infirmières, la parodontologie et l’odontologie pédiatrique…), les pratiques professionnelles courantes (pratique de l’échographie et de la rééducation périnéale par certains médecins et sages-femmes), la participation à la permanence des soins, les certifications qualité obtenues…
En revanche, le Conseil d’État préconise d’exclure la communication de certaines informations comme l’obtention de diplômes non contrôlés et non reconnus, le nombre d’actes réalisés par les praticiens, les notations/évaluations des patients, les comparatifs tarifaires sur les dispositifs médicaux ou encore les montants des rémunérations sur objectifs (ROSP) touchées par les médecins.
Permettre aux pharmaciens d’officine de communiquer sur les services pharmaceutiques
Répondant à une attente forte de la plupart des pharmaciens, l’évolution de leur code de déontologie pourrait permettre à ces derniers de communiquer sur les services cliniques proposés aux patients (entretiens pharmaceutiques, vaccination contre la grippe, bilans partagés de médication…) ou la certification qualité relative aux bonnes pratiques de dispensation des médicaments (norme AFNOR Iso 9001, label QMS Pharma…). Mais là où le Conseil d’État propose une « petite révolution », c’est dans la possibilité donnée aux pharmaciens de communiquer sur leur appartenance à un groupement ou à une enseigne de pharmacies. Une telle possibilité ouvrirait ainsi la voie à un travail inédit de communication auprès du grand public afin de faire connaître leurs offres de services et leur positionnement spécifique. Cette proposition porte les prémices d’une mutation importante du réseau officinal.
VERS UNE PLUS GRANDE LIBERTÉ DE COMMUNICATION POUR LES PHARMACIES D’OFFICINE ?
4 juillet 2018
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LES ECHOS ETUDES
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