Les années se suivent et se ressemblent... et vont très probablement continuer à se ressembler dans les années qui viennent. Hormis le rebond de l’automédication, lié à l’impact positif de déremboursements des antiarthrosiques et d’une forte pathologie hivernale, les tendances sur le marché officinal demeurent en effet remarquablement stables. L’année 2015 a confirmé l’érosion tendancielle des prix observées depuis plusieurs années, sous l’effet conjugué des baisses de prix des médicaments remboursables (- 675 millions d’euros à volume constant par rapport à 2014) et de la progression des génériques (+ 1, 3% en valeur selon les estimations du GERS). L’analyse des facteurs de croissance et de décroissance sur le marché « ville » augure d’une baisse durable des ventes de médicaments, entre – 0,5 et – 1 % chaque année d’ici à 2020, selon les projections concordantes d’IMS Health et du GERS. Si ce scénario se confirme, le marché officinal aura en 2020 « effacé » la croissance des 15 dernières années et retrouvera, en valeur, son niveau des années 2005-2006.
Une vision pessimiste de l’avenir donc, à mettre en perspective avec le redressement des comptes de la branche Maladie, dont le déficit représente à lui seul près de 55 % de celui de la Sécurité sociale. Grâce aux efforts continus de régulation économique, ce déficit est « tombé » l’année dernière à 5,8 milliards d’euros et les dépenses de santé n’ont progressé que de 2 %, un niveau particulièrement faible au regard d’une demande de soins en constante progression. Sur la seule année 2016, l’Assurance maladie attend au total quelque 3,4 milliards d’euros d’économies supplémentaires, en s’appuyant en grande partie sur l’encadrement des prescriptions et des dispensations en médecine de ville (relance des génériques, poursuite des baisses de prix, augmentation des ROSP des médecins...). Tous les leviers d’économies sont aujourd’hui actionnés, de manière à respecter la trajectoire de redressement des comptes sociaux dont le retour à l’équilibre est prévu par la Cour des comptes vers 2021.
La permanence quasi certaine de cette politique de régulation entraînera toute une série de conséquences pour la pharmacie d’officine. La première est qu’elle va accélérer le basculement d’une part croissante de la MDL vers des rémunérations forfaitaires de diverse nature, en fonction des services que les pharmaciens choisiront de développer. La deuxième concerne les modalités de valorisation des officines, sujet qui devient majeur en raison de la vague importante d’ici cinq ans des départs à la retraite de titulaires. L’EBE est désormais le critère essentiel de valorisation de l’officine, ce qui induit pour le pharmacien une optimisation de ses achats et une surveillance accrue de sa structure de coûts. Enfin, les relais de croissance sont définitivement à chercher en dehors du médicament, sur des marchés hors monopole et vers de nouvelles activités à valeur ajoutée (suivi d’observance, coaching de patients, téléconsultations en officine, services à domicile...). Autant d’évolutions qui se dessinent depuis plusieurs années, mais qui vont s’accélérer à l’horizon 2020.
Source : Les perspectives de la pharmacie d’officine à l’horizon 2025, Les Echos Etudes, mai 2016
Article publié dans la revue Profession Pharmacien du mois d'avril 2016.