La conjugaison du phénomène hard-discount et convenience stores montre que la tendance est à la progression des concepts segmentant ayant fait le choix d’une clientèle ciblée par le biais d’un positionnement précis : prix bas et offre épurée pour le hard-discount ; produits à forte valeur ajoutée et services pour le convenience. Une évolution qui a pour corollaire l’essoufflement des formats universalistes qui ont pour ambition de s’adresser à l’ensemble de la population (hypermarchés et supermarchés en France), confrontés à un décalage croissant avec les évolutions sociétales et les nouvelles attentes des consommateurs (plaisir, expertise, temps libre). Hors des frontières domestiques, l’internationalisation des activités constitue toujours un relais de croissance incontournable pour les enseignes européennes. Néanmoins, les implantations étrangères demeurent moins rentables que les activités nationales et les dernières années ont illustré les dangers liés à une sous-estimation des risques pays : en Amérique latine, les dévaluations sont venues fragiliser les structures financières des groupes. Il en ressort une plus grande prudence dans les stratégies de développement à l’international : rationalisation des implantations (retrait d’Auchan des États-Unis et de Ahold d’Amérique latine en 2003) et focalisation géographique sur des zones prioritaires (Carrefour au Brésil). Toutefois, deux régions continueront d’attirer l’essentiel des investissements à moyen terme : l’Asie, portée par une croissance démographique et économique forte. Les enseignes occidentales y multiplient les implantations : Carrefour, Casino et Tesco à Taïwan, Tesco en Malaisie… La Chine apparaît comme le marché le plus attractif ; les pays d’Europe de l’Est. Si le dynamisme de la consommation y est moindre qu’en Asie (population stagnante, dynamisme économique moins marqué), la région bénéficie d’un arrimage croissant de son économie à l’Union européenne et propose par conséquent un faible risque monétaire. La région connaît une multiplication des ouvertures de magasins (Hongrie, République tchèque mais aussi Roumanie et Russie) ; multiplication des partenariats (Leclerc et Conad en Italie, Carrefour et Maji Al Futtain en Égypte) ; croissance externe conditionnelle sous la forme de prises de contrôle graduelles en fonction des résultats (exemple de l’acquisition du japonais Seiyu par Wal-Mart sur plusieurs exercices et conditionnée à l’atteinte d’objectifs prédéterminés). Au regard des perspectives financières, l’exercice 2002 marque une période charnière. Les performances de la grande distribution sont au plus bas : le chiffre d'affaires des enseignes du panel Les Échos Études a crû à un rythme particulièrement faible de 4,2 % contre des croissances à deux chiffres sur les six exercices précédents. En effet, Il n’y a pas eu d’acquisition d’envergure pour doper la croissance des enseignes du panel. En outre, les effets de change ont pesé sur le chiffre d'affaires des groupes présents en
Amérique latine (ainsi, le chiffre d'affaires consolidé de Carrefour a reculé de 1,1 % en 2002, mais il progresse de 4,6 % à change constant). Enfin, la dégradation de la conjoncture a pesé sur la consommation des ménages et les enseignes n’ont pu jouer sur les prix pour dynamiser leurs ventes comme cela avait pu être le cas lors des exercices précédents (à une conjoncture porteuse s’était ajouté le passage à l’euro). La profitabilité a continué de s’éroder. Le taux de marge d’exploitation s’inscrit à 3,3 % contre 3,9 % en 1996 et 3,7 % en 1999. Le ralentissement de la consommation des ménages a contraint les enseignes à défendre leurs parts de marché par l’entremise de promotions. Toutefois, les mesures défensives prises par les enseignes (réduction des investissements qui limite mécaniquement le poids des amortissements ; plan de réduction des charges d’exploitation…) commencent à faire sentir leurs effets et les taux de marge opérationnelle devraient rebondir en 2003. Concernant l’évolution de la structure financière du panel, le taux d’endettement net a connu un rebond à 82,1 % après un recul en 2001. Suite aux opérations de croissance externe entreprises à la fin de la décennie 1990, les groupes avaient vu leur taux d’endettement net progresser fortement. Après une période de désendettement, les enseignes ont été rattrapées
en 2002 par les dévaluations des devises sud américaines. Celles-ci ont impacté négativement leurs fonds propres (dépréciation d’actifs) ce qui a mécaniquement
accru le taux d’endettement net de plusieurs groupes d’envergure (Carrefour, Ahold, Casino).Néanmoins, derrière ces chiffres pessimistes, il est possible de déceler les
signes d’une accélération prochaine de la croissance, d’une amélioration des marges et d’une consolidation de la structure financière du secteur. En effet, la dégradation constatée au niveau des performances financières du secteur en 2002 est essentiellement due aux grandes difficultés rencontrées par Ahold et, dans une moindre mesure, par Laurus. Hormis ces enseignes, les groupes de distribution ont su stabiliser leurs marges, voire les ont amélioré en 2002. En outre, l’exercice 2003 confirme l’amélioration des performances à mesure que les effets des dévaluations sud américaines s’estompent, que les plans d’économie mis en place montent en puissance et que l’Asie connaît un rebond économique fort. En 2004, le rebond annoncé de la conjoncture économique mondiale devrait renforcer cette tendance. Les enseignes les plus exposées au marché nord américain (Ahold, Delhaize, Sainsbury) et les groupes présents sur des marchés dont la conjoncture économique est très liée à l’économie américaine (Metro en Allemagne) devraient bénéficier en premier lieu de la conjoncture plus favorable. À l’international, les marchés asiatiques et d’Europe de l’Est offrent les perspectives de développement les plus intéressantes pour les enseignes européennes. Les premiers connaissent un dynamisme économique et démographique
qui en font des marchés relais de croissance de premier ordre (Chine notamment). Concernant l’Europe de l’Est, la problématique est différente. Si le dynamisme économique et démographique est moindre, la perspective de l’entrée prochaine dans l’Union européenne d’un grand nombre de pays en fait une zone stable. Les groupes n’y seront pas exposés au principal risque qui les menace : celui des dévaluations monétaires.
Le marché de la distribution boosté par le hard-discount
19 juillet 2003
par
Les Echos Etudes
Les Echos Etudes
19 juillet 2003
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Le marché de la grande distribution en Europe