Apparue en Europe à la fin des années 1990, la vente en ligne de médicaments connaît aujourd’hui des évolutions très disparates selon les pays. Une situation qui s’explique en grande partie par l’hétérogénéité des réglementations nationales et ce, malgré un cadre réglementaire commun issu de l’arrêt « Doc Morris » de 2003 et de la Directive de 2011[1]. Ainsi, certains pays autorisent la vente en ligne de tous les médicaments de prescription et d’automédication, la réservant aux seules pharmacies d’officine (Allemagne, Suède, Danemark...) ou l’autorisant aux pure players du e-commerce (Royaume-Uni et Pays-Bas). Alors que d’autres la limitent aux seuls médicaments d’automédication et aux détenteurs d’une officine physique (France, Belgique, Portugal, République tchèque...). Autre disposition réglementaire importante à prendre en compte : la question des flux de distribution cross border entre différents Etats membres. En Allemagne par exemple, les distributeurs localisés dans certains pays (Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède, Islande et République tchèque) sont autorisés à vendre des médicaments aux patients allemands, une possibilité que ne prévoit pas le droit français. A ces réglementations diverses, s’ajoutent des caractéristiques spécifiques à chaque marché, en particulier les niveaux de prix moyens des médicaments, la part que représente l’automédication (de 5 % des ventes de médicaments en Espagne à 15 % en Belgique), ainsi que les habitudes de consommation pharmaceutique propres à chaque pays.
Il ressort de ces situations diverses un paysage européen très fragmenté du canal Internet. On estime à plus de 7 000 le nombre de sites de vente en ligne autorisés, qu’ils soient indépendants ou adossés à des chaînes de pharmacies, avec toutefois un niveau de concentration très élevé puisque seulement trois pure players réalisent plus de 100 MEUR de chiffre d’affaires annuel : le suisse Zur Rose, leader européen de la vente en ligne (propriétaire du néerlandais Doc Morris) et les allemands Shop-apotheke et Sanicare. Un leadership qui s’appuie sur le dynamisme du e-commerce en Allemagne, où les ventes se sont élevées à plus d’un milliard d’euros en 2015, en croissance de 9 % sur un an. Comment expliquer ce dynamisme qui tranche avec la faiblesse du marché hexagonal ? Par la conjugaison de plusieurs facteurs : la largeur de l’offre disponible sur Internet, alliant médicaments, cosmétiques, dispositifs médicaux et produits de nutrition, des prix compétitifs par rapport au commerce traditionnel, des délais de livraison courts et des habitudes d’achats en ligne désormais bien ancrés parmi les consommateurs (49 % des internautes allemands achètent des médicaments sur Internet). Autant de conditions qui sont encore loin d’être réunies en France...
Source : Les Echos Etudes, La distribution pharmaceutique en Europe, janvier 2017.
Article initialement publié dans le numéro de janvier 2017 de Profession Pharmacien.
- [1] Directive n°2011/62/UE du 8 juin 2011.