[INTERVIEW] NOUS ALLONS ACCELERER SUR L'ECO-RENOVATION

Crédit photo : Damien Benoist Giraudiere

Vous avez créé Little Worker en 2016 avec Nicolas Bletterer.
Comment est née cette idée ?

Aurélien Bros : Nicolas et moi, nous nous sommes connus chez Vinci Construction, où nous étions tous les deux ingénieurs. Nous avons notamment participé ensemble à la construction du stade Paris La Défense Arena, à Nanterre. Au cours de nos discussions, nous faisions le même constat, qu’étant dans le BTP, nos amis, notre famille nous sollicitaient beaucoup pour leur projet de rénovation. Lorsqu’ils achetaient un bien immobilier, ils ne savaient pas vers qui se tourner pour la partie travaux, ni le coût que cela pouvait représenter. D’un autre côté, nous savions que beaucoup d’entrepreneurs cherchaient des chantiers en plus de leur travail quotidien. Nous nous sommes alors dit qu’il y avait un concept à créer pour que ces deux mondes arrivent à se rencontrer. C’est comme ça qu’est né Little Worker !

Quelles sont vos activités ?

A. B. : nous avons trois grands métiers. Le premier est la chasse immobilière. Nous aidons les particuliers à trouver le bien qui réponde à leurs attentes. Dans 95 % des cas, ce sont des projets avec rénovation. C’est là qu’interviennent nos deux autres métiers : celui de la conception pour la partie technique et architecturale (choix des matériaux, plans…) et celui de la rénovation pour l’exécution des travaux. Ces trois métiers nous permettent de proposer un accompagnement global à nos clients.

Disposez-vous de vos propres équipes ?

A. B. : oui, nous avons en interne une grosse équipe de chasseurs immobiliers, de commerciaux, de conducteurs de travaux et d’architectes. Pour la partie travaux, nous sous-traitons leur exécution à des entrepreneurs. Mais nous ne sommes pas une plate-forme d’intermédiation. Nous avons le statut de contractant général. À ce titre, nous sommes le garant contractuel et financier des projets. Le client signe son contrat avec Little Worker.

À qui s’adresse votre offre ?

A. B. : notre clientèle est très urbaine. Nous avons des agences dans les 7 grandes villes que sont Bordeaux, où est notre siège, Paris, Lyon, Marseille, Lille, Toulouse et Nantes. Nous avons également ouvert 2 showrooms à Bordeaux et à Lyon. Nous visons le marché de l’immobilier ancien, en centre-ville et périphérie proche. À 70 %, nous rénovons des appartements. Le panier moyen est d’environ 70 000 € pour la partie travaux et 350 000 € pour l’achat immobilier.

Quelle place occupe le digital dans votre modèle ?

A. B. : elle est centrale. Nous avons une équipe d’une dizaine de développeurs qui travaillent sur des outils technologiques permettant d’améliorer l’expérience client. Notre application leur permet, par exemple, de suivre l’avancée de leur chantier, d’échanger avec les différentes parties prenantes… Mais nous sommes avant tout sur un métier d’Hommes. Au final, il y aura toujours une personne qui ira poser le carrelage. Je dirais que nous avons surtout importé les codes du digital dans un métier assez traditionnel.

Concrètement, comment s’organise le parcours client entre digital et physique ?

A. B. : un particulier qui a un projet de rénovation remplit un questionnaire sur notre site et reçoit, dans un délai de 72 h, un chiffrage poste par poste. Ensuite, l’entrepreneur et notre commercial se rendent sur place pour ajuster le devis. Une fois celui-ci validé, le projet passe entre les mains de notre équipe Conception. Nous gérons également l’ensemble des commandes de matériaux et leur approvisionnement sur nos propres dépôts logistiques pour que les entrepreneurs démarrent la partie travaux. Le chantier est entièrement supervisé par Little Worker.

Où en est Little Worker dans son développement ?

A. B. : notre développement a été rapide. Nous comptons aujourd’hui 170 salariés pour un chiffre d’affaires d’environ 30 M€. 2023 a été une année charnière. Nous avons levé 10 M€ en avril et nous avons été lauréat du programme FT120, dédié aux entreprises en hypercroissance.

Comment entrevoyez-vous les mois à venir, avec la crise ?

A. B. : nous avons, pour l’instant, plutôt bien résisté même si le marché est devenu très compliqué au 2nd semestre 2023. La production de crédits immobiliers s’est complètement écroulée. Nous sommes inquiets dans la mesure où nous ne savons pas si le marché a atteint un plafond bas ou pas. Hier encore, le directeur de notre banque me confiait que c’était la pire crise immobilière qu’il ait connu en 35 ans de carrière. Mais nous restons confiants dans notre capacité à croître. Nous sommes sur un positionnement premium, moins impacté par les difficultés immobilières. Nous constatons, en revanche, une très forte hausse du nombre d’entrepreneurs qui souhaitent travailler avec nous. Nous sommes inquiets sur le taux de défaillance dans ce secteur.

Quels sont vos projets pour l’avenir ?

A. B. : bien sûr, continuer de grossir. Nous sommes encore un petit acteur sur le marché. Mais notre principal objectif est d’accélérer sur l’éco-rénovation. Nous sommes sur un segment de marché où la rénovation énergétique telle qu’elle est poussée par le gouvernement est compliquée : notre clientèle est peu concernée par les aides et les biens que nous rénovons sont très spécifiques. Vous ne pouvez pas isoler par l’extérieur un bâtiment haussmannien. Alors, nous développons des solutions adaptées. Et cela fonctionne ! En moyenne, un bien qui passe entre nos mains fait un saut de 2 à 3 classes sur le DPE. C’est un sujet sur lequel nous voulons continuer à accélérer ! Par exemple, nous proposons depuis quelques mois une sorte de « nutriscore » pour mesurer l’empreinte environnementale de tous les matériaux que nous utilisons.

Fiche d’identité

Dénomination : Little Worker

Activités : chasse immobilière, conception et rénovation d’intérieurs

Création : 2016

Effectif : 170 personnes

Web : www.littleworker.fr

Copyright : Les Echos Publishing