Qu’est-ce qui vous a amené à créer votre entreprise ?
Arnaud Le Rodallec : j’ai commencé ma carrière chez Invoxia, qui fabrique des objets connectés, plutôt dans le domaine de la domotique, où je suis passé par plusieurs types de postes, du support client au développement produit, en passant par le marketing. C’est dans ce cadre que j’ai rencontré Éric Carreel, qui a fondé plusieurs entreprises dans le monde des objets connectés au cours des 20 dernières années, dont la plus connue est Withings, et qui a aussi co-fondé Invoxia. Nous avons échangé autour de projets qui pourraient être développés autour des objets connectés et, de fil en aiguille, nous en sommes venus à parler des vélos.
Pourquoi les vélos ?
A. L R : à l’époque, les premiers acteurs des vélos sans station émergeaient en Asie, comme Ofo, Mobike… Pour nous, c’était le synonyme d’un changement de paradigme, dans le sens où l’intelligence des systèmes de vélos partagés se déplaçait de la station dans le vélo. Or, rendre le vélo connecté était un savoir-faire que nous connaissions. Ça, c’était le premier point de départ. Le deuxième, c’était la nécessité de retravailler la façon dont on stationne les vélos puisque le free floating créait beaucoup de désordre dans les villes. Ça n’était pas soutenable, il fallait trouver une solution pour garer les vélos de façon plus compacte, plus ordonnée et pour autant moins lourde en termes de coûts et de temps que les stations « traditionnelles ». Nous avons imaginé un système qui fonctionne comme pour les chariots de supermarché : avec une borne ancrée dans le sol, puis les vélos qui s’accrochent les uns après les autres. Cela nous permet de parquer 10 à 15 vélos par station sur une place de parking. Par ailleurs, la solution est 5 à 10 fois moins chère qu’une station « traditionnelle », elle est très rapide à déployer et elle permet de recharger les vélos de proche en proche.
Quelles ont été les étapes de la création de Zoov ?
A. L R : nous avons créé l’entreprise en 2017. Les 6 premiers mois ont été consacrés au recrutement d’ingénieurs et au passage de l’idée à la concrétisation du produit. Au bout de ces 6 mois, nous avons commencé à converger vers une façon d’accrocher les vélos ensemble, de gérer la connectivité… Nous avons alors pu développer la première version du produit. Et ainsi, un an après la création de l’entreprise, nous avons pu annoncer 2 choses : le déploiement sur la zone de Paris-Saclay de 200 vélos en béta-test et une 1re levée de fonds de 6 M€ pour nous permettre d’accélérer, de continuer à agrandir l’équipe et de déployer plus largement nos systèmes.
Nous avons opéré pendant 6 mois sur Paris-Saclay avant de déployer une nouvelle version en septembre 2019 pour corriger certains défauts de conception et d’implémenter des améliorations. En parallèle, nous nous sommes lancés à Bordeaux, cette fois commercialement. À ce moment, nous opérions 800 vélos sur ces 2 zones.
Puis la crise Covid est arrivée ?
A. L R : oui, l’année 2020 a été source de beaucoup de questionnements, car les revenus liés à l’exploitation prenaient du temps à se développer. Nous avons alors décidé de commencer à vendre notre technologie à d’autres exploitants : les vélos, les batteries, les pièces détachées ainsi que le volet logiciel. Nous avons signé un 1er contrat avec l’opérateur privé Pony qui a déployé en septembre 2020 nos vélos à Grenoble, puis en février 2021 à Paris. Puis, nous sommes entrés en discussion avec le français Smoove qui fournit environ 50 000 vélos à travers le monde dans des villes comme Vancouver, Bangkok… ainsi que les Vélibs à Paris. Nous avons vu la complémentarité entre la belle emprise internationale de Smoove et notre technologie plus moderne, plus connectée et avec plus de logiciel. En avril 2021, nous avons annoncé la fusion de nos 2 entreprises pour créer un leader européen des technologies de vélos partagés.
Quel est le nouveau périmètre d’activité de l’entreprise ?
A. L R : l’entreprise fusionnée va garder les zones d’exploitation de Bordeaux et Paris-Saclay car elles nous permettent d’apprendre énormément quand nous lançons une nouvelle version du produit. Mais ce n’est plus l’axe principal de notre business model, qui restera de vendre des systèmes à d’autres exploitants, que ce soient des opérateurs privés comme Pony ou dans le cadre d’appels d’offres publics comme nous avons pu en gagner à Landerneau, Épinal, Carcassonne et une 4e ville que nous annoncerons bientôt. Depuis la fusion, nous avons beaucoup d’échanges avec l’international et nous avons vocation à déployer la technologie de Zoov sur les appels d’offres où Smoove était déjà présent, mais nous voulons aussi continuer à nous développer sur le territoire français.
Qu’est-ce qui différencie votre technologie de celle de vos concurrents ?
A. L R : les coûts d’achat et d’installation plus bas rendent possible de couvrir des zones moins denses dans les grandes agglomérations et de proposer une offre pour les villes de taille moyenne.
Par ailleurs, nous venons d’annoncer une nouvelle version du vélo adapté à la fois au vélo partagé et à la location longue durée grâce à la possibilité de monter un porte-bagage et de déverrouiller la batterie avec l’appli. L’idée est de permettre à un exploitant ou une collectivité d’opérer en simultané les 2 services pour baisser les coûts d’exploitation.
Enfin, nous développons l’intégralité de la technologie, ce qui nous permet de remonter des données des différents capteurs et de proposer des analyses très poussées sur l’état de la chaussée ou sur l’état des vélos pour détecter les pannes le plus rapidement possible, voire les anticiper.
Fiche d’identité
Dénomination : Zoov
Activité : fourniture de technologies pour les services de vélos partagés
Parc de vélos : 50 000 dans 30 villes (Zoov et Smoove)
Effectif : 130 personnes (Zoov et Smoove)