Comment a démarré votre parcours d’entrepreneur ?
Briac Lescure : l’aventure entrepreneuriale, arrivée très tôt dans mon parcours, n’a pas débuté par une idée mais par une rencontre. À la sortie de l’Edhec, j’ai rejoint, pendant un an, le fonds d’investissement en capital risque Jaïna Capital où j’ai travaillé comme analyste avec mon associé actuel, François de Fitte. Très complémentaires, nous avions tous deux la volonté de monter une entreprise. Nous étions aux premières loges pour identifier les tendances entrepreneuriales à potentiel. Nous avons perçu l’émergence des plates-formes de livraison de repas en BtoC à l’étranger et nous avons décidé de quitter le fonds pour créer en 2014 Popchef, une plate-forme de livraison BtoC pour le déjeuner sur le marché français. Mais il a fallu faire preuve d’agilité pour nous imposer. À ce titre, nous avons été amenés, face aux difficultés rencontrées, à faire évoluer notre modèle à deux reprises, en 2017 puis 2019.
Quel virage a connu Popchef en 2017 ?
B. L. : le marché était devenu ultra-concurrentiel avec des acteurs type Deliveroo, Uber Eats, très bien financés et avec une offre plus profonde qui nous pénalisait. En parallèle, un rapprochement capitalistique avec Elior qui s’intéressait à notre business model a finalement avorté. Au pied du mur, avec des difficultés à retenir nos clients et comme nous perdions de l’argent, deux options se présentaient à nous. Soit un arrêt définitif de l’activité, soit une réorientation qui nécessitait malheureusement de nous séparer d’une grosse partie de nos salariés. Nous avons donc décidé d’abandonner notre activité initiale BtoC pour nous lancer sur une activité de livraison de plateaux-repas en BtoB à destination des entreprises. Ce marché était moins concurrentiel et avait peu innové. C’était une période très difficile pour nous. Nous sommes passés d’une quarantaine de salariés à 5 personnes, avec peu de moyens. Avec mon associé, nous sommes repartis de zéro à organiser des dégustations chez les clients. Nous sommes assez vite remontés à des bons niveaux de chiffre d’affaires et pas très loin de l’équilibre.
Pourquoi avez-vous fait à nouveau évoluer le modèle en 2019 ?
B. L. : nous avions la volonté de grossir en nous diversifiant avec une innovation plus porteuse que le marché des plateaux-repas. Et nous avions observé aux États-Unis des start-up qui s’étaient lancées dans un business de frigos connectés installés directement chez l’employeur. En mai 2019, nous avons donc fait une nouvelle levée de fonds sur ce projet de frigos connectés. Cette nouvelle solution permettait de couvrir tout un pan du marché français qui n’était pas adressé. Celui des entreprises qui veulent proposer une solution de restauration du quotidien à leurs collaborateurs sur site 7 jours/7, mais qui font moins de 200 couverts par jour et n’intéressent donc pas les SRC (sociétés de restauration collective). Outre les frigos connectés, nous avons également développé les comptoirs avec la présence d’un barista. Mais le frigo connecté représente la brique centrale de notre offre et pèse désormais 75 % de notre chiffre d’affaires.
Comment se porte votre activité aujourd’hui ?
B. L. : à partir de mai 2021, toutes les opportunités qu’on a accumulées avec les prospects ont commencé à se convertir et notre business a explosé. Cette évolution favorable nous a permis début 2022 de procéder à une nouvelle levée de fonds significative de 15 M€, avec un fonds à impact Meridiam. Cette année, nous avons multiplié notre chiffre d’affaires par 3 par rapport à 2021.
Le travail hybride a-t-il réduit le potentiel du marché ?
B. L. : avec l’essor du télétravail, le marché global adressable s’est effectivement réduit en nombre de couverts. Mais il n’y a pas moins de clients employeurs. De plus, nous touchons un marché, celui des 30 à 100 couverts/jour, qui n’était pas ciblé avant. Enfin, tous les sites trustés par les SRC qui faisaient, avant la crise, entre 200 et 400 couverts/ jour, basculent, avec l’essor du télétravail, en un nombre de couverts que nous sommes complètement capables d’adresser. De fait, maintenant, nous pouvons adresser des sites qui font 250 couverts/jour. Selon moi, le marché va être progressivement remplacé par des offres de frigos connectés.
Où êtes-vous implanté ?
B. L. : aujourd’hui, nous adressons les sites qui font entre 30 et 300 couverts par jour principalement sur l’Île-de-France. La région parisienne concentre, en effet, 60 % du potentiel du marché de la restauration collective en entreprises. Nous ne nous positionnons pas sur les sites qui font plus de 300/400 couverts par jour et les acteurs de la restauration collective le font très bien. Sur 99 % de nos sites, nous sommes la seule solution de restauration.
Quelles sont vos ambitions de développement ?
B. L. : pour nous, la clé c’est d’aller vite. Nous sommes dans une course à la taille car c’est le nerf de la guerre pour s’imposer durablement sur ce marché. Nous allons continuer de nous développer, de lever des fonds pour investir massivement afin d’étendre notre périmètre d’activité. Nous avons vocation à aller sur des sites de plus grosse taille. Les employeurs ont compris que le système des frigos connectés pouvait fonctionner sur des sites de 150-200-300 couverts. Nous ambitionnons un déploiement dans tout l’Hexagone, puis, ensuite, d’aller à l’étranger, notamment en Europe. Nous sommes convaincus de la profondeur du marché. Nous nous fixons pour objectif pour les 5 prochaines années de continuer à faire au minimum 100 % de croissance tous les ans via la croissance organique, mais nous sommes également ouverts à des opportunités de croissance externe en rachetant d’autres acteurs en France ou à l’étranger.
Fiche d’identité
Dénomination : Popchef
Activité : solutions de restauration en entreprises
Création : 2014
Effectif : 150 dont la moitié au siège
Web : https://popchef.com