La densité du réseau français d’agences bancaires est l’une des plus élevées parmi les grands pays industrialisés. Aucun établissement ne songe cependant à réduire son parc d’agences à court ou moyen terme, compte tenu de l’intensité concurrentielle et de la préférence des Français pour la proximité physique des agences. Certains groupes prévoient même la poursuite de leurs ouvertures nettes de guichets en France (Crédit Lyonnais, CIC, Banques Populaires…). Cette contrainte concurrentielle implique de mieux rentabiliser les implantations existantes et d’optimiser l’efficacité commerciale des nouvelles implantations. En d’autres termes, l’objectif n’est plus aujourd’hui de disposer du réseau le plus grand mais du réseau le plus « intelligent » (EDS France) comme le montre notre étude de marché. A titre d’illustration, selon Experian, on a pu observer sur la période 1996-2001 deux stratégies de réseau différenciées pour le Crédit Lyonnais et pour les Banques Populaires :
• le Crédit Lyonnais a essentiellement opéré des « allègements » (réduction du nombre d’agences dans des zones déjà bien dotées), avec 239 allègements sur la période (ce qui correspondait néanmoins à une contrainte imposée par la Commission européenne ainsi qu’à une contrainte financière) ;
• les Banques Populaires ont axé leur politique de réseau sur le « renforcement » (261 agences supplémentaires) et la « conquête » (36 agences supplémentaires).
Le point clé pour décider de l’installation d’une agence dans une zone géographique est la proximité de celle-ci par rapport à la population visée. Le géomarketing, dont
l’utilisation se diffuse dans les banques, permet de mesurer sur des zones géographiquement localisées les potentiels des marchés, grâce au croisement :
• de données socio-économiques (y compris le profil moyen de la clientèle en termes d’équipement en produits bancaires voire en termes comportementaux) ;
• de données sur les réseaux concurrents ; • de données démographiques.
Le découpage de la population est de plus en plus précis, allant jusqu’à « l’iris », autrement dit les pâtés de maisons de 2 000 habitants. Ce découpage permet de mieux dimensionner les implantations en fonction du potentiel de marché et de la « densité » concurrentielle. Il permet également d’optimiser l’allocation des effectifs (quel niveau de compétence dans quelle zone) et des équipements (DAB/GAB, LSB) en fonction des besoins locaux et de la clientèle déjà acquise par les agences concurrentes. L’offre géomarketing de différentes sociétés spécialisées (Asterop, Claritas, EDS, Experian, Géoconcept) permet aujourd’hui de caractériser des typologies assez précises des iris dans une ville ou une zone rurale. Les données statistiques permettent aux réseaux de mieux appréhender leurs clients potentiels ou actuels et orientent les effectifs et l’offre produits par zones sur des critères objectifs. Un exemple d’étude géomarketing. BNP Paribas utilise un logiciel de mise à jour en temps réel des comportements des clients dans leur environnement économique. Asterop a mis en place le système décisionnel d’optimisation de la performance commerciale et des potentiels de développement de son réseau d’agence. Chaque agence est reliée par Intranet à l’ordinateur central qui met a jour la base de données en permanence. Cela permet au
niveau local de mettre en évidence des classes de clients à cibler ou bien de renforcer ou de délaisser des emplacements. Les outils de géomarketing permettent de dresser des typologies d’agences en fonction de critères objectifs. Au-delà de son utilité pour constituer un maillage optimal sur une région, une ville, voire un quartier, le géomarketing doit être utilisé pour : • évaluer les emplacements pouvant être supprimés à la suite d’une fusion de réseaux ;
• personnaliser les campagnes de mailings et de publicité en fonction des zones géographiques ;
• contribuer à définir les objectifs commerciaux de chaque agence en fonction de son emplacement et de sa typologie, voire les primes ou la part variable des rémunérations des chargés de clientèle. Les réseaux bancaires ont encore du chemin à parcourir dans ce domaine par rapport aux acteurs de la grande distribution, qui pratiquent une différenciation très fine des objectifs commerciaux des surfaces en fonction de leur emplacement, de leur flux de clientèle, etc. Enfin, le géomarketing doit être repensé dans le cadre du multicanal. Les clients préférant utiliser les canaux à distance pour souscrire certains produits ou effectuer des transactions doivent être localisés afin d’adapter le réseau d’agences et les effectifs, afin de limiter l’empilement des coûts des canaux de distribution. Le géomarketing devra donc évoluer pour discriminer les zones en fonction de l’appétence de la clientèle locale pour les canaux à distance. On observe ainsi que les clients des banques à distance sont le plus
souvent situés à Paris/RP, dans la région Rhône-Alpes et PACA, ainsi que dans les grandes métropoles (Bordeaux). Symétriquement, grâce aux données produites par le géomarketing, les zones d’implantation jugées les moins rentables (zones sensibles notamment) peuvent être équipées de libre services bancaires et la clientèle locale peut être encouragée à migrer vers les canaux à distance.