La pharmacie Apothical se veut un lieu de vie, tourné vers le service, la naturalité et le bien-être. Interview de Xavier Benedetti, son directeur général en charge du développement de l’enseigne.
« Nous souhaitons réinventer l’univers de la pharmacie
et de la parapharmacie »
Après une vingtaine d’années d’expérience dans la grande distribution spécialisée (Décathlon et Toys « R » US) et à la tête de fabricants de jouets, vous avez pris la direction de GPO en 2018. Qu’est-ce qui vous a poussé à rejoindre l’univers de la pharmacie d’officine ?
Xavier Benedetti : le défi que représente la transformation d’un groupement traditionnel de pharmacies en une véritable enseigne. C‘est un projet passionnant car le réseau officinal est encore peu organisé en enseignes, voire pas du tout si l’on considère le terme « enseigne » dans son acception la plus large. Sa direction souhaitait recruter un directeur général avec un parcours professionnel en dehors de l’officine, pour apporter un regard neuf, différent. Je reconnais que cela a été au début un peu déstabilisant pour certains adhérents ! Mais aujourd’hui, tous sont convaincus qu’il faut innover et faire évoluer les codes du métier de pharmacien.
Comment avez-vous abordé ce virage important pour le groupement GPO ?
X.B. : en commençant par fédérer l’ensemble des pharmaciens autour de ce projet stratégique, lequel ne peut réussir que si tous les membres du réseau adhèrent à la même vision et se dotent d’une charte commune. GPO est actuellement constitué d’une quarantaine de pharmacies. Une taille qui permet donc d’obtenir rapidement un consensus et d’aller vite dans les prises de décision.
Quel est le profil des pharmacies Apothical ?
X.B. : ce sont des pharmacies de taille importante, qui réalisent en moyenne des chiffres d’affaires annuels de l’ordre de 10 M€. Il s’agit donc de « méga-pharmacies », pour reprendre le terme communément admis aujourd’hui. Elles sont dirigées par des pharmaciens qui sont très attachés à la dimension « professionnel de santé », tout en assumant pleinement qu’ils sont aussi des chefs d’entreprise.
Quelle est la répartition des ventes entre médicaments et produits hors monopole ?
X.B. : la parapharmacie représente en moyenne 60 % de l’activité. Il s’agit bien-sûr d’un univers stratégique pour nos officines, mais la concurrence des pure players du e-commerce et des e-parapharmacies est de plus en plus forte. La pharmacie évolue dans un univers hyper concurrentiel, il est donc impératif de « sanctuariser » l’activité générée par la dispensation des médicaments, tant en termes de chiffre d’affaires que de services associés.
Cet objectif est-il au cœur du concept de l’enseigne ?
X.B. : tout à fait. Le concept Apothical vise à répondre aux différents enjeux de la pharmacie : rester compétitif sur la parapharmacie avec une offre large de produits, valoriser le service et la dispensation pharmaceutique, tout en répondant aux nouvelles tendances de consommation qui privilégient l’éthique et la naturalité. Et inventer des nouveaux modèles d’officines afin d’offrir une nouvelle expérience client. La taille de nos officines nous donne les moyens de développer et de financer un véritable concept d’enseigne. Car une enseigne ne se réduit pas à une politique de référencement, une charte visuelle commune et des concepts d’agencement uniformes. Il faut avoir la même vision du métier de pharmacien, qui est plus que jamais un métier de service.
Comment définir en quelques mots le concept Apothical ?
X.B. : santé, naturalité et bien-être. Il se décline en quatre niveaux : l’offre, qui fait la part belle aux produits de santé naturels (phytothérapie, aromathérapie…) et à la clean beauty, les conseils à la vente de ces produits (des naturopathes et des nutritionnistes sont présents dans les officines), la commercialisation de marques de niche, et enfin, les services pharmaceutiques, auxquels nous accordons des espaces dédiés.
« Notre promesse : l’expérience santé et nature ».
Quelle place donnez-vous au numérique ?
X.B. : tout dépend de ce qu’on entend par numérique. La pharmacie vit les mêmes transformations que les autres circuits de distribution de détail, elle doit donc proposer une expérience omnicanal « sans couture ». Les solutions numériques doivent servir cette expérience et valoriser les services proposés dans la pharmacie. Je ne crois pas aux gadgets digitaux dans les espaces de vente. En revanche, nous déployons des solutions à valeur ajoutée : le click & collect, le scan d’ordonnance, les applications de rappel de prise et de renouvellement d’ordonnances, les messageries sécurisées permettant les échanges entre le pharmacien et le patient.
Où en êtes-vous, fin 2019, du déploiement d’Apothical ?
X.B. : les 39 officines sont en train d’installer les nouveaux aménagements extérieurs. Début 2020, toutes auront installé l’enseigne Apothical sur leur façade. Une fois cette première étape franchie, nous passerons à la deuxième, à savoir la refonte des aménagements intérieurs.
Quels sont vos critères de recrutement pour les pharmacies qui souhaiteraient rejoindre l’enseigne ?
X.B. : l’une des premières conditions est la surface disponible, actuelle ou potentielle. Elle doit être au minimum de 500 m2, car en-deçà, le concept ne peut se déployer. Deuxième critère : le chiffre d’affaires annuel. Le seuil minimal est de l’ordre de 4,5 M€, sachant toutefois que celui-ci n’est pas figé. On peut en effet accepter une officine dont le CA actuel est inférieur, mais qui a un projet viable de transfert ou d’agrandissement qui lui permettra d’atteindre cette taille critique et très vite la dépasser. Autres conditions : le pharmacien titulaire doit détenir des compétences managériales et un fort niveau d’expertise, mais aussi et surtout partager nos valeurs, être ouvert au partage d’expérience et à la solidarité entre membres.
Pour finir, quelle est votre vision de la pharmacie de demain ?
X.B. : la pharmacie sera un pôle interprofessionnel de santé, centré sur les services aux patients et aux consommateurs. J’emploie volontairement ce dernier terme car je pense qu’il faut aussi travailler sur l’expérience d’achat et apporter du plaisir dans la pharmacie. L’officine ne doit plus fonctionner en vase clos, comme si les évolutions actuelles du retail ne la concernaient pas. A quoi aspirent aujourd’hui les consommateurs ? A fréquenter des espaces où l’on aime passer du temps et où on se fait du bien. Nous devons donc imaginer des lieux de vie agréables, où l’on puisse se promener, prendre un moment pour soi, s’informer, faire de la prévention… C’est ce que nous concrétisons avec l’enseigne Apothical.
Fiche d’identité
- Dénomination : Apothical
- Nombre d’officines adhérentes : 39 début décembre 2019, 45 à 50 au 1er janvier 2020
- Surface moyenne des officines : 500 à 600 m2, certaines pharmacies dépassent les 1 000 m2
- Zone de chalandise dominante : centres commerciaux
A savoir : Apothical compte parmi ses membres la pharmacie Cap3000, installée à Saint-Laurent-du-Var. Elle deviendra d’ici quelques mois la plus grande pharmacie d’Europe, une fois ses travaux de transformation achevés, avec une surface de 3 500m2, dont 2 500m2 de surface de vente.
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Interview réalisée par Hélène Charrondière, directrice du pôle Pharmacie-Santé des Echos Etudes, pour la revue trimestrielle L'Essentiel de la Santé, janvier 2020, publiée par Les Echos Publishing.