Evoqués depuis de nombreuses années, les entretiens de patients sous anticancéreux oraux devraient entrer dans le champ conventionnel en 2020. Un nouveau service officinal qui pourrait concerner environ 150 000 patients.
Les dernières séances de négociation entre les parties signataires de la convention pharmaceutique ont permis de franchir un pas important. Réunis en Commission paritaire nationale des programmes d’accompagnement (CPNPA), les représentants de l’Assurance-maladie, de la FSPF et de l’USPO se sont mis d’accord sur le déroulé des entretiens de patients cancéreux traités par chimiothérapie orale. Ceux-ci seront organisés sur deux ans, avec 3 entretiens la première année et 2 entretiens l’année suivante. Ces deux cycles d’accompagnement pourront toutefois être modifiés si le traitement est modifié en cours de route. La première séance (ou entretien d’inclusion) permettra au pharmacien de recueillir un certain nombre d’informations sur la personne malade, notamment administratives. Les périodes de prise en charge seront calculées sur 12 mois, à compter de l’inclusion du patient, et le pharmacien sera rémunéré par l’Assurance-maladie au terme de chaque cycle d’accompagnement. « Le principe est que le pharmacien soit payé de tous les entretiens qu’il fait, quelle que soit l’évolution de la situation du patient », selon Sophie Sergent, présidente de la commission pharmacie clinique de la FSPF, citée dans Le Moniteur des Pharmacies du 11 octobre dernier. De même que pour les entretiens « AVK » et « Asthme », l’objectif de ce suivi en pharmacie sera d’améliorer la détection des effets iatrogènes afin d’y répondre le plus rapidement possible. Et de mieux suivre l’observance thérapeutique des patients, sujet majeur dans le domaine de la chimiothérapie anticancéreuse orale puisque l’efficacité de ces traitements est compromise si le seuil d’observance est inférieur à 80 %.
Rappelons que le nombre de patients recevant un traitement anticancéreux par chimiothérapie orale est en constante progression depuis le début des années 2000. Une évolution qui s’explique par l’arrivée de nombreuses molécules per os, dont un tiers appartient à la classe des thérapies ciblées. Ces dernières se caractérisent par un mode de réponse très prolongé, impliquant un traitement au long cours (parfois plusieurs années) et un suivi en ambulatoire devant être opéré par des médecins généralistes, des pharmaciens d’officine et des infirmières libérales, si possible dans le cadre de coopérations interprofessionnelles.
On dénombre actuellement 58 molécules anticancéreuses par voie orale disponibles en médecine de ville. Chacune fait l’objet d’une fiche d’information élaborée par l’INCa (Institut national du cancer) qui doit être adaptée au contexte officinal. Un travail de longue haleine qui explique les délais relativement longs pour mettre en place ce nouveau service en pharmacie.
A noter : dans le cadre du Plan cancer 2014-2019, et plus particulièrement de son action 3.2, l’accompagnement de l’essor des traitements par anticancéreux oraux est un des chantiers prioritaires, avec pour objectifs de faire évoluer l’organisation de l’offre de soins et d’adapter les modes de financement.
Source : Parcours de soins d’un patient traité par anticancéreux oraux, INCa, octobre 2016
Quelques précisions
- Tout changement de molécules en cours de traitement se traduira par un nouveau cycle d’entretiens (sauf la première séance d’inclusion qui ne sera pas à refaire).
- La liste nominative des traitements anticancéreux sera régulièrement mise à jour par l’Assurance-maladie, en fonction des lancements de nouveaux produits.
- Les rémunérations des pharmaciens n’ont pas encore été dévoilées.
- Le nombre de patients éligibles est estimé à 500 000. Selon l’Assurance-maladie et les représentants officinaux, les entretiens pharmaceutiques viseraient un tiers d’entre eux, soit 150 000 personnes environ et 7 à 8 patients en moyenne par pharmacie. Il est toutefois probable que ce nouveau service se concentrera autour de pharmacies et d’équipes officinales choisissant de se former au suivi des patients cancéreux et développant une offre globale de services et de produits associés (exemple : conseils spécifiques en nutrition, proposition de dermocosmétiques adaptés, etc.).
Sources d'informations :
- Une enquête a été réalisée en 2018 auprès de patients sous chimiothérapies anticancéreuses orales par la Conférence nationale des URPS pharmaciens libéraux (CNUPL). Consulter le dossier de presse de cette étude.
- Présentation de Murielle Dahan, Inspectrice IGAS, du 24 mai 2019, lors de la journée de Conférence nationale des URPS Pharmaciens (Oncopole de Toulouse) : « Chimiothérapie à domicile : on avance ensemble ! - Rôle du pharmacien d’officine et des équipes de santé dans le parcours de vie du patient ». Consulter la présentation de Muriel Dahan.
Pour aller plus loin, découvrez notre étude sur les services en pharmacie d'officine.