Office Santé s’est spécialisé dans la promotion immobilière de maisons et pôles de santé. Un marché en plein essor qui ouvre de belles perspectives à cette jeune société bretonne. Interview de Stéphane Guivarc’h, président d’Office Santé.
Vous avez créé Office Santé en 2011, sur le créneau, à l’époque étroit, des MSP et pôles de santé. Qu’est-ce qui vous a poussé dans cette aventure ?
Stéphane Guivarc’h : j’ai créé Office Santé à un moment où ces structures de soins commençaient à intéresser les professionnels de santé. L’idée m’est venue grâce à un ami médecin généraliste, qui m’a fait prendre conscience des évolutions de l’exercice médical et des problèmes d’accès aux soins. Les professionnels de santé aspirent de plus en plus à exercer au sein de ce que l’on appelle aujourd’hui des collectifs de soins. Mais ils ont besoin d’être accompagnés, en particulier pour le financement, la construction et la gestion des locaux.
Sur quelles activités vous positionnez-vous ?
S.G. : nous gérons le financement des projets, la construction des locaux et le développement des services destinés à faciliter la gestion quotidienne de ces structures. Nous allons donc jusqu’au facility management et commençons à intégrer des services numériques utiles aux médecins. Nous venons ainsi de signer un partenariat avec la société Livi pour proposer une solution de téléconsultation clé en main. La partie « FM » est appelée à se développer, en particulier pour les grosses structures qui regroupent plusieurs dizaines de cabinets médicaux et paramédicaux.
Comment définissez-vous la raison d’être de votre entreprise ?
S.G. : notre objectif est de redonner du temps de soins aux professionnels de santé. Les maisons de santé ne sont pas uniquement destinées à lutter contre les déserts médicaux ; elles doivent permettre de mutualiser certaines fonctions de gestion et tâches administratives, afin de libérer du temps et gagner en efficacité.
Après 6 ans d’existence, que représente votre activité en termes de chiffre d’affaires et de nombres de projets ?
S.G. : nous avons réalisé en 2019 un chiffre d’affaires de 12 M€, hors Office Santé Investissements, notre structure foncière. Nous avons livré en décembre dernier notre 14e maison de santé. Une quarantaine de projets sont en cours de construction et sur le premier semestre 2020, nous avons d’ores et déjà lancé 7 nouvelles opérations.
La promotion immobilière requiert des engagements financiers importants. Comment financez-vous vos projets ?
S.G. : les besoins de financement sont évidemment élevés car la construction d’une MSP coûte en moyenne 600 K€. L’investissement peut monter jusqu’à 7-8 M€ pour les MSP de 2 500 à 3 500 m2. Les cycles de production sont par ailleurs longs : il faut entre 25 et 30 mois pour qu’une maison accueille ses premiers patients. Sachant qu’en moyenne, nous gérons chaque année une douzaine de projets, quel que soit leur stade d’avancement. Nous nous finançons par plusieurs biais : l’autofinancement, le recours à des concours bancaires et le soutien de nos actionnaires. Nous avons en effet procédé à une levée de fonds en 2017, auprès notamment de Groupama Bretagne, la Mutuelle MBA et Trecobat, un constructeur immobilier présent dans l’Ouest et l’Île-de-France.
Privilégiez-vous des territoires en particulier ?
S.G. : en raison de nos origines bretonnes, notre activité s’est naturellement développée dans un premier temps dans l’Ouest de la France. Nous avons progressivement élargi notre implantation à l’Aquitaine et l’Ile-de-France, où nous avons installé une antenne, basée à Paris. Nous commençons à nous implanter en Rhône-Alpes et dans les Hauts-de-France.
Des régions dont les problématiques d’accès aux soins sont très différentes.
S.G. : certes, mais au-delà des disparités régionales, on constate que les déserts médicaux et l’exercice en groupe gagnent partout du terrain. Nos projets actuels révèlent une grande diversité de situations : certaines MSP sont installées à proximité de centres commerciaux (ex. : celle en cours de construction à Brest-Gouesnou), d’autres sont localisées dans des quartiers résidentiels ou en plein centre-ville, comme à Toulouse. On investit aussi les zones urbaines, grâce à l’initiative « Action Cœur de Ville » et au Programme National de Renouvellement Urbain. A titre d’exemple, nous sommes en train de construire une MSP à Lorient, dans le QPPV du Bois du Château, caractérisé par une forte densité d’habitat social. Notre marché s’inscrit dans des logiques territoriales qui intègrent de multiples facteurs : motivation des collectivités locales, démographie médicale, besoins des populations, etc.
Les situations favorables à l’installation des pôles et MSP se diversifient donc. Face à ce potentiel grandissant, quels sont les atouts essentiels pour réussir dans cette activité ?
S.G. : la première condition est la solidité du projet médical qui porte ces structures. Un projet qui doit répondre à de véritables problématiques d’accès aux soins et réunir une équipe de professionnels de santé motivés. L’autre condition est la connaissance fine des collectivités locales et l’identification du bon interlocuteur politique (commune, intercommunalité ou région). Chaque projet immobilier est donc conçu en fonction des spécificités du territoire et de son attractivité, en coopération étroite avec les élus locaux et toujours en lien avec les structures de soins déjà existantes.
« Toute opération immobilière doit être portée par un projet médical solide ».
Vous proposez donc plusieurs modèles de MSP ?
S.G. : oui, car notre démarche est avant tout pragmatique. Dans certains cas, le projet est co-construit avec les élus et les professionnels de santé déjà présents sur le territoire ; dans d’autres situations, il est porté et co-financé par une collectivité locale, préalablement à l’élaboration d’un projet médical qui est ultérieurement défini, une fois les équipes de soins constituées. Une fois construites, certaines MSP sont revendues aux professionnels qui y exercent. Dans d’autres cas, les collectivités locales acquièrent toute ou partie de la MSP. Et pour certains projets, Office Santé reste propriétaire des murs et loue les locaux, via notre société foncière, Office Santé Investissements.
Quelle est en moyenne la taille des maisons de santé que vous construisez ?
S.G. : la taille varie grandement d’un projet à l’autre. Il n’y a pas de format standard. Les plus importantes rassemblent plusieurs dizaines de professionnels de santé sur 2 à 3 000 m2. A titre d’exemple, nous allons livrer l’été prochain le Parc d’Activités de Santé de Sartrouville, dans les Yvelines. Une quinzaine de structures de soins vont s’y installer, sur 2 500 m2 dans un premier temps, et ultérieurement sur 3 500 m2, avec l’arrivée de nouveaux cabinets paramédicaux. Autres exemples : les projets de Brest-Gouesnou (2 000 m2) et de Toulouse (1 500 m2).
Y a-t-il une tendance forte en faveur de ces méga-MSP ?
S.G. : c’est un modèle parmi d’autres qui est appelé à se développer. Mais nous ne sommes pas dans une course au gigantisme ! L’important est de s’adapter aux spécificités locales et de s’appuyer sur un projet médical pérenne.
Fiche d’identité
Création en 2011, décollage de l'activité à partir de 2014
Société basée à Saint-Grégoire, en Ille-et-Vilaine (35)
Effectif : 12 collaborateurs
Chiffre d’affaires fin 2019 hors Office Santé Investissements : 12 M€ contre 5 M€ en 2018
Interview réalisée en mars 2020 par Hélène Charrondière, directrice du pôle Pharmacie-Santé des Echos Etudes, pour le compte des Echos Publishing.