Les enjeux du marché de l'emballage

13 juillet 2002 par
Les enjeux du marché de l'emballage
Les Echos Etudes

Mener de front l’investissement en machines et l’amélioration de la formation du personnel ! Au milieu des années 1970 (Cf. notre étude de marché), il fallait à Stock Express 8 000 heures pour procéder au conditionnement de 350 000 coffrets de fard : pose et collage d’un godet de couleur, pose d’une feuille Cellophane, repiquage et pose d’une étiquette, fermeture du coffret, mise en étui, regroupement par 12 sous rétractable, réemballage en carton. Aujourd’hui, ce temps doit être divisé par deux ou par cinq pour répondre aux exigences de souplesse et de réactivité des industriels. Dans le cadre de son développement, le prestataire en copacking et en comanufacturing doit faire face à un dilemme entre mécanisation et embauche : d’un côté, des machines fiables et rapides, mais qui représentent un investissement conséquent qu’il faut amortir, de l’autre
une main-d’oeuvre flexible, mais qui assure une faible cadence. Il s’agit donc de trouver un point d’équilibre. Les machines sont couteuses, mais permettent d'atteindre des cadences élevées. Le copacking et le comanufacturing sont deux activités capitalistiques, en dépit du recours important à la main-d’oeuvre. L’investissement de base est en effet conséquent : en plus du local (entrepôt), le prestataire doit s’équiper d’un parc de machines minimum. En 1999, le marché français des machines d’emballage-conditionnement s’est élevé à 1,1 milliard d’euros, en hausse de 12 % par rapport à l’année précédente (source : Enquête annuelle du ministère de l’Industrie). Eurocaf, le syndicat professionnel des conditionneurs à façon, considère que la valeur du parc machines des prestataires représente 50 à 60 % de leur chiffre d’affaires annuel.
Par exemple, pour une soudeuse haute fréquence (blisterisation), il faut compter 65 000 euros ; pour une filmeuse, entre 150 000 et 300 000 euros ; pour une
thermoformeuse, environ 250 000 euros ; et une manchonneuse 9 couleurs avoisine le million d’euros.
La productivité des machines ne cesse de progresser :
• sur une ensacheuse horizontale, on peut atteindre le million de sacs en une semaine ;
• les nouvelles machines d’adhésivage peuvent déposer 120 à 130 étiquettes à la minute ;
• les peseuses associatives atteignent les 80 coups (pesées) à la minute, avec une marge d’erreur inférieure à 0,5 % ;
• une ligne de remplissage et de sertissage de boites de conserve rondes en traite 70 000 à l’heure.
Certaines acceptent même plusieurs types de contenants et s’adaptent très rapidement au changement (intervention humaine réduite).
􀁻 Poursuivre l’investissement en machines
Les façonniers locaux se sentent protégés sur leur marché par les relations de proximité qui les lient à leurs clients. Si l’arrivée massive de nouveaux prestataires locaux est peu probable, il se peut en revanche que le marché se contracte sous deux effets :
• la croissance même de leurs clients, qui changent de taille et pourraient être intéressés par l’offre de prestataires généralistes ;
• l’apparition de machines plus abordables destinées à traiter épisodiquement de faibles volumes, et dont l’acquisition est rentable pour le client, même dans ces conditions
(adaptation de l’offre des fabricants, comparable à celle intervenue sur le marché des photocopieurs).
La tendance générale est à la mécanisation et à l’augmentation du parc machines. La relance de l’investissement est une réponse qui permet de garder une offre attractive et de retrouver une dynamique de croissance en modernisant l’équipement. Cette relance comporte toutefois des risques, notamment celui de se trouver temporairement avec un équipement surdimensionné. Choisir la mécanisation de l’activité revient aussi à modifier la structure de coût de l’activité, les coûts fixes se substituant aux coûts variables (charges salariales liées aux intérimaires). Mais pour cela, il faut améliorer le niveau de formation du personnel avec une main-d'oeuvre flexible et peu qualifiée. Dans le cas des activités de copacking, la main-d’oeuvre est souvent peu qualifiée : elle exécute des tâches répétitives à faible valeur ajoutée. En revanche, pour les activités de comanufacturing, il faut faire appel à une main-d’oeuvre plus qualifiée : les manipulations sont plus complexes, les opérations de contrôle sont multipliées. Parallèlement, le développement des services de conseil marketing/emballage et d’ingénierie nécessite d’embaucher des profils très qualifiés. D’une manière générale, on assiste donc à un gonflement de la masse salariale moyenne. La charge supplémentaire induite par la loi sur les 35 heures contribue à accélérer la mécanisation.
Comme dans de nombreuses industries, les équipes sont organisées selon le principe des 2/8 ou des 3/8, ce afin d’assurer une utilisation optimale de l’outil industriel. De plus, l’activité des prestataires en copacking et en comanufacturing peut être très saisonnière : on a alors recours au travail temporaire. Chez Giraud Conditionnement, le personnel dédié à la ligne de conditionnement pour l’opérateur de téléphonie passe ainsi de 200 personnes en période creuse à 500 personnes lors de pics saisonniers (Noël). Au Packaging Center européen de Kodak, géré par FM Logistic, ce sont 180 à 350 personnes qui travaillent, selon la demande (plus forte en été). Mais les variations peuvent aller de 1 à 10, notamment chez les prestataires qui conditionnent des boissons alimentaires. La formation est un des points faibles du secteur. L’amélioration du niveau de formation du personnel est utile à plusieurs titres :
• les industriels souhaitent externaliser des opérations plus techniques (dans le copacking et surtout dans le comanufacturing), opérations qui sortent des compétences actuelles des personnels : former c’est donc répondre à une demande du marché. Par exemple, les opérations de conditionnement alimentaire impliquent de former les personnels aux normes d’hygiène, le conditionnement des produits classés (sites Seveso) nécessite de former les manutentionnaires à la manipulation des produits dangereux ;
• la croissance des prestataires crée des postes d’encadrement qu’il est préférable de pourvoir en interne. Le développement des compétences est une priorité pour les prestataires s’ils souhaitent proposer des services à plus forte valeur ajoutée. Lorsque les industriels externalisent une part croissante de leur activité vers ces prestataires, il faudrait en toute logique que ces prestataires disposent d’un personnel aussi compétents que celui de l’industriel. C’est rarement le cas, excepté pour les leaders du marché qui ont entrepris une politique de formation interne et de recrutement externe. Les industriels collaborent étroitement avec les prestataires pour former les personnels et superviser le déroulement des opérations. Ainsi, une équipe d’ingénieurs de Kodak travaille en permanence au Pack Center européen situé en Seine-et-Marne, alors que ce site est géré par FM Logistic. Au cours des prochaines années, les deux priorités d’investissement des prestataires de copacking/comanufacturing seront vraisemblablement les investissements en machines et le recrutement de personnel qualifié. Les investissements industriels ne posent pas de problème particulier aux entreprises financièrement saines. En revanche, le recrutement de personnel qualifié soulève un certain nombre de difficultés : mauvaise image du métier de prestataire logistique auprès des cadres, entrepôts localisés loin des bassins de maind’oeuvre…
L’enjeu pour les prestataires est de taille car la poursuite de l’externalisation, qui constitue l’essentiel de la croissance du marché, implique que le personnel du prestataire soit au même niveau de qualification que celui du client. C’est ainsi que les prestataires pourront passer d’une logique de soustraitance à une culture de gestionnaire de services.

Les enjeux du marché de l'emballage
Les Echos Etudes 13 juillet 2002
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