Clap de fin annoncé pour le gaz naturel
La programmation pluriannuelle de l'énergie, qui définit le cap permettant à la France d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, est claire quant à l’avenir du gaz naturel : « Le gaz naturel est une énergie fossile qui, à ce titre, devra être supprimée du mix énergétique de 2050 ». Parallèlement à la réduction de la consommation, l’atteinte de cet objectif devra nécessairement passer par le développement des gaz renouvelables. Biogaz, biométhane, hydrogène vert… les efforts de décarbonation poussent à explorer toutes les voies. Si toutes ces technologies sont soutenues par une politique incitative (tarifs d’achat, appels à projets…), elles avancent en ordre dispersé.
Le biogaz progresse à un rythme relativement régulier, notamment pour sa valorisation sous forme d’électricité, qui représente aujourd’hui l’essentiel des unités de production. Mais le nombre de sites injectant du biométhane dans les réseaux de gaz naturel explose. En un peu plus d’un an, le parc d’installations a doublé. Parallèlement, le gaz naturel véhicule (GNV), et son équivalent biosourcé (bioGNV) devient une véritable alternative aux carburants classiques pour la mobilité lourde et séduit de plus en plus transporteurs et opérateurs de la mobilité. Quant à l’hydrogène renouvelable, tout reste à faire. Son développement est pour l’instant anecdotique mais les initiatives se multiplient. Plus de 120 projets sont en phase de montage ou de construction (source VIG’HY), avec des applications principalement dans la mobilité.
Changer d’échelle
L’avenir de ces filières repose sur leur compétitivité prix. Et pour l’instant on n’y est pas. Tous les acteurs sont engagés dans une course de vitesse, alimentée par l’arrivée des gros énergéticiens, pour massifier leur production et réduire leurs coûts. L’objectif est de préempter le marché et d’attirer des fonds, en particulier les subventions. La CRE anticipe plus de 500 M€ d’aides à l’injection de biométhane en 2021, soit le double de 2020. Pour l’hydrogène décarboné, la stratégie nationale prévoit une enveloppe de 7 milliards d’euros d’ici 2030.
Les marges de réduction de coûts sont réelles dans le biométhane, mais relativement étroites car la taille des installations est limitée. La marche est haute et le temps compté… avant un éventuel tour de vis. En revanche, pour l’hydrogène, les leviers sont bien plus importants. La fabrication d’électrolyseur n’est pas encore entrée en phase industrielle et la course aux projets de gigafactories est lancée.
Risque d’emballement
Cette manne financière augure de prometteuses opportunités pour la multitude d’acteurs actuels et à venir qui s’intéressent à ces filières. Pourtant, certaines ambitions pourraient bien être contrariées.
Dans le biométhane, les perspectives sont très bonnes. Les objectifs de 2023 seront, vraisemblablement, largement dépassés et ceux de 2028 atteints. Mais un scénario comparable à celui du photovoltaïque n’est pas à écarter. A la phase d’emballement et d’accélération du marché que nous vivons actuellement pourrait succéder un ralentissement brutal du marché provoqué par un durcissement du soutien public pour limiter l’inflation de l’enveloppe budgétaire.
Concernant l’hydrogène, la plupart des perspectives font état d’un développement rapide et très important. Certes, c’est une énergie qui a de véritablement atouts environnementaux et les soutiens sont massifs. Mais les incertitudes et les défis à relever sont également importants. Techniquement, les technologies décarbonées sont immatures. Elles doivent faire leurs preuves. Economiquement -et c’est le corolaire du point précédent-, l’hydrogène décarboné est loin de la compétitivité. Pour certains usages, notamment pour la mobilité légère, l’hydrogène arrive tardivement…