Dans la grande distribution, les cartes privatives sont au coeur de l’offre financière. Ces cartes constituent un outil de fidélisation et un support pour l’octroi de crédits à la consommation (sous forme de crédits revolving et de réserves d’argent pour réaliser des achats en magasin et payer en plusieurs fois). Elles permettent de solvabiliser la demande, d’augmenter les paniers moyens (les porteurs consomment davantage) et de dégager des marges additionnelles. Ces cartes sont commercialisées avec une politique tarifaire attractive concernant le montant de la cotisation, voire gratuitement sur des durées limitées, dans le cadre d’opérations de conquête.
Leur attrait est renforcé par le fait qu’elles permettent aux porteurs de bénéficier :
d’opérations promotionnelles en magasins,
de points de fidélité, de caisses réservées,
de crédits gratuits,
d’un bouquet de services plus ou moins développé selon les enseignes.
Les enseignes de grande distribution, qu’elles soient à dominante alimentaire ou spécialisées cherchent :
à accroître le taux de pénétration de ces cartes au sein de la clientèle ;
à augmenter leur utilisation (d’où des politiques de développement de l’interopérabilité, des services associés, des accords passés avec des réseaux bancaires pour permettre aux porteurs d’accéder plus facilement à un réseau de DAB : Banque Accord/La Poste, cartes d’enseigne associées à Franfinance permettant de retirer de l’argent liquide dans les DAB de la Société Générale son actionnaire, carte Aurore de Cetelem permettant des retraits dans le réseau de BNP Paribas qui est son actionnaire et dans le réseau des Caisses d’Épargne).
La démarche des distributeurs consiste à capitaliser sur la base de clientèle constituée des porteurs de cartes afin d’élargir l’offre dans deux directions :
l’épargne ;
l’assurance dommages (automobile, habitation et produits à faibles primes de type extensions de garanties liés aux achats en magasins).
La distribution de produits d’épargne est peu développée (le taux de pénétration sur les porteurs de cartes serait de l’ordre de 1 % à 2 %). Elle est surtout réalisée par les grandes enseignes à dominante alimentaire (Auchan et Carrefour) ainsi que des vépécistes ou leurs filiales bancaires. La distribution spécialisée est demeurée en retrait, focalisant son offre sur le crédit à la consommation adossée ou non à une carte privative.
Les produits financiers commercialisés sont des produits de masse destinés au grand public :
des comptes rémunérés proposés par la quasi totalité des enseignes (Compte Pass de Carrefour, Compte Épargne Auchan). Ils servent souvent de support à des offres d’appel basées sur le taux. La présentation des produits occulte certains de leurs défauts pour la clientèle (obligation d’un certain solde moyen pour bénéficier de tel niveau de rémunération, évolution possible du taux à la baisse en fonction des évolutions de marché) ;
des OPCVM essentiellement chez Carrefour (qui est en pointe dans l’épargne avec une gamme couvrant les placements du court terme au long terme, huit ans) ;
de l’assurance vie chez Auchan, Carrefour et certains vépécistes.
Il existe deux types de positionnements :
une offre étendue et complète (sans être sophistiquée) qui relève d’un positionnement de deuxième banque ;
une offre étroite mais très ciblée qui relève d’un positionnement de troisième banque. La grande distribution n’a pas particulièrement innové techniquement et son offre ne se différencie pas significativement sur ce plan.
Elle a axé son développement sur la compétitivité des tarifs, la simplicité des produits et leur facilité de compréhension jouant un rôle dans la démocratisation des produits financiers (peu de conseil nécessaire, une gamme segmenté en fonction des grands besoins : études des enfants, aléas, retraite), la mise en avant de certaines promesses dans les argumentaires marketing (praticité, souplesse, garanties en capital, garanties de performances, diversité des fournisseurs etc.) et des offres promotionnelles, sans sur-rémunérer l’épargne ou faire du discount. L’objectif est de parvenir à des niveaux de rentabilité comparables (en vitesse de croisière) aux autres activités, ce qui exclut un positionnement discount.
Ces produits sont distribués :
en magasin avec des options différentes selon les enseignes. Dans la distribution à dominante alimentaire, Carrefour se situe en pointe par l’étendue de sa gamme et la visibilité accordée à ses espaces financiers. Auchan se montre très ambitieux avec Banque Accord mais n’a pas créé d’espace dédié aux services financiers. Intermarché, Cora (qui vient de lancer une offre financière commercialisée dans des espaces dénommés Corafinances qui sont encore en phase expérimentale), Système U, Leclerc et Casino sont en retrait, voire absents. Les forces de ventes en magasins sont le plus souvent des hôtesses qui sont polyvalentes et vendent autre chose que des produits financiers de façon à limiter les coûts (les produits sont commercialisés dans des espaces services, comme chez Auchan où se trouvent : la billetterie, les produits sous vitrine, les voyages etc.). On trouve plus rarement des forces de vente spécialisées dans des espaces financiers. La distribution spécialisée n’a pas créé d’espace spécifique, hormis des box pour les formalités de constitution des dossiers d’octroi des crédits à la consommation ;
par correspondance en ce qui concerne la grande distribution à dominante alimentaire, les vépécistes et leurs filiales financières (plates formes téléphoniques, marketing direct et Internet plutôt en support de vente ou en service associé du type consultation de compte, simulations).
Les enseignes ont essentiellement opté pour des partenariats de distribution : Intermarché commercialise le livret Épargne Orange d’ING, Carrefour distribue des produits conçus par Axa en assurance vie, des FCP de la Société Générale (SGAM), Auchan s’est associé aux AGF (au travers d’Arcalis en assurance vie et de HSBC pour le Compte Épargne Auchan), Quelle et les Trois Suisses proposent de l’assurance vie en partenariat avec GMF Vie. Il y a peu d’exemples de filiales communes (telle que Carma Vie, filiale commune de Carrefour et Axa).