Accompagné par Antoine Pulcini et Simon Bestel, Charles Raymond a créé les Promus Box pour optimiser le premier kilomètre dans le cadre de la vente directe de produits agricoles.
Comment en êtes-vous arrivé à créer Promus ?
Charles Raymond : je suis fils d’artisan-boucher dans le sud de la France à Castres et petit-fils d’éleveur de bovins. Après un diplôme d’ingénieur généraliste, j’ai intégré un grand groupe de l’agroalimentaire, Danone, dans lequel j’ai travaillé une dizaine d’années. J’ai toujours eu, dans un coin de ma tête, l’idée d’entreprendre dans le monde agricole, même si je n’ai jamais travaillé à proprement dit dans l’affaire familiale. Mais j’avais besoin de trouver les bons partenaires. Avec Antoine Pulcini et Simon Bestel, que j’ai rencontrés chez Danone, nous partagions les mêmes objectifs de favoriser l’agriculture de demain, de rendre l’alimentation plus saine et durable et de promouvoir le secteur agricole. Forts de ces valeurs communes, nous nous sommes lancés fin 2017 dans l’aventure Promus.
Nous nous sommes d’abord concentrés sur la mise en relation entre les circuits de distribution d’un côté, comme les magasins spécialisés, la restauration collective, et les producteurs de l’autre. Pendant 3 mois, nous sommes allés voir des restaurateurs qui voulaient s’approvisionner en local et nous avons créé les premiers réseaux logistiques. Nous nous sommes rapidement rendus compte que notre valeur ajoutée était plutôt sur ces réseaux. En fait, l’intermédiation commerciale était « facile », car tout le monde voulait avoir des produits locaux. En revanche, personne ne savait vraiment comment s’approvisionner. C’est à ce moment-là que nous avons eu l’idée de créer notre innovation, la Promus Box.
Comment vous est venue cette idée ?
C. R. : nous avons pris du recul sur l’ensemble de la chaîne logistique des ventes locales, en prenant en compte nos expériences passées, très « opérations », et ce que nous avons vu sur le terrain. Il y a 3 étapes sur la chaîne logistique : le premier kilomètre, la longue distance et le dernier kilomètre. La deuxième étape est déjà très optimisée. Quant au dernier kilomètre, de nombreuses réflexions sont en cours et des solutions émergent. En revanche, personne ne travaillait le premier kilomètre.
Pour expliquer comment nous est venue l’idée de la Promus Box, il faut revenir sur notre fonctionnement initial qui consistait à regrouper les marchandises chez un producteur du réseau. C’était contraignant : il fallait qu’il ait une chambre froide, que nous puissions maîtriser et suivre la température…
Il nous est alors paru évident qu’il fallait recréer des hubs logistiques au plus proche des producteurs. Des hubs qui intègrent tous les standards de la logistique : traçabilité produit, contrôle de la température, maîtrise totale en termes d’hygiène et de sécurité alimentaire. C’est ainsi que nous avons créé notre premier hub connecté, la Promus Box. Il s’agit d’un container aménagé, qui occupe une surface de 20 à 40 m² au sol. En volume, cela représente à peu près 3,5 à 4 tonnes par semaine de produits locaux.
Quel service proposez-vous exactement ?
C. R. : concrètement, nous sommes juste une interface entre le producteur et le distributeur pour qui nous organisons le transport. Nous vendons donc des kilos transportés, facturés soit au circuit de distribution, soit au producteur selon ce qui a été décidé. Nous mettons à disposition de nos clients des contrats négociés avec plusieurs profils de transporteurs en fonction du type de commandes que nous devons traiter : des acteurs nationaux sur la messagerie froide, la messagerie sèche, la palette… Pour apporter la meilleure offre possible, que ce soit en termes de service ou de coûts, nous avons développé des algorithmes d’optimisation dédiés à ce marché très spécifique de la vente directe. Nous avons un peu le rôle d’une tour de contrôle, mais dans la logistique de la vente directe pour le monde agricole.
Quelle est votre valeur ajoutée ?
C. R. : notre valeur réside dans la mutualisation. Nos clients obtiennent grâce à nous une réduction de 20 % à 40 % des coûts de transport. Sachant que le coût de la logistique dépasse souvent 40 % du prix du produit vendu directement par un producteur, ça n’est pas négligeable. Nous fournissons également une traçabilité produit. Mais l’impact n’est pas que financier. Nous avons été lauréat de l’ADEME, en 2018, sur l’appel d’offre de la logistique urbaine durable, car nous parvenons à réduire de 40 % les émissions de carbone sur une expédition.
Quelle est votre stratégie de développement ?
C. R. : tout d’abord, un mode que l’on pourrait appeler « par tâche d’huile ». Nous ciblons une zone de chalandise et de production, nous y implantons un hub et ensuite, nous essayons de mailler le territoire avec les distributeurs locaux. Nous développons le réseau en suivant les besoins de nos clients. Le deuxième type de stratégie, c’est de nouer des partenariats avec des distributeurs, des chambres d’agriculture ou des associations de producteurs sur de nouveaux territoires, qui peuvent être loin de notre zone initiale afin de créer un nouveau réseau.
Quels sont vos objectifs à moyen terme ?
C. R. : actuellement, nous avons 3 box en exploitation – dont 2 depuis mars – et 3 en production. L’objectif d’ici la fin de l’année, c’est de mailler complètement notre région d’implantation, les Pays de la Loire, et de s’implanter dans une seconde région en septembre, probablement dans le Sud de la France. À plus long terme, il faudrait 300 Promus Box pour mailler tout le territoire français. C’est notre ambition.
Les retours sont positifs, notamment des administrations locales pour qui les enjeux environnementaux et de valorisation de l’agriculture locale sont très importants. Nous avons, par exemple, obtenu des financements des régions Pays de la Loire et Rhône-Alpes, mais aussi de Bpifrance.
À quelles difficultés avez-vous fait face ?
C. R. : entreprendre n’est jamais si facile. Mais la principale problématique a été la compréhension de la logistique et du soutien que nous souhaitions apporter. Ce n’est pas un sujet évident et c’est l’un des principaux freins à la vente directe. Il a fallu faire des efforts en termes de pédagogie pour expliquer notre proposition de valeur. D’ailleurs, c’est quelque chose qui est très important pour nous : mettre de l’humain dans tout ce que l’on fait. Car notre apport ne se limite pas au digital dans la Promus Box. La proximité et l’humain sont des valeurs que nous essayons de promouvoir à la fois dans nos relations en interne et avec nos interlocuteurs externes.
Fiche d'identité
Dénomination : Promus
Activité : logistique de la vente directe de produits agricoles
Présence géographique : région de Nantes
Effectif : 6 collaborateurs
Nombre de Promus Box : 3 en exploitation et 3 en production