Les évolutions poussent Casino à renouveler le concept de l'hypermarché, tout en poursuivant l'internationalisation de ses activités et en confortant son positionnement multiformats.
Dans notre étude de marché nous montrons comment Casino a profité des spécificités de ses hypermarchés Géant (taille modeste et implantations proches des centres-villes) pour moderniser et limiter l'érosion des ventes de ce format. En mai 2002, le distributeur stéphanois a ainsi lancé son concept de l'hypermarché de proximité en ouvrant le magasin de Tours-La-Riche. Ce nouvel établissement, qui entend conjuguer les avantages des supermarchés et des magasins discount, repose sur différentes initiatives sources de différenciation : renforcement du confort d'achat, réalimentarisation, féminisation du point de vente. Parallèlement, le groupe a renouvelé son programme de fidélisation en partenariat avec Cofinoga (cartes de paiement, de fidélité…) et entend donner la priorité aux prix bas, une volonté qui pourrait être remise en cause par la fermeture de la centrale Opéra. Ce nouveau concept présente d'ores et déjà des performances supérieures à celles des hypermarchés traditionnels mais nécessite encore d'être « validé » à une plus grande échelle avant de lancer un programme de rénovation du parc de magasins, qui sera coûteux. Dans le même temps, le groupe a poursuivi son internationalisation, à un rythme toutefois moins soutenu. Fin 2001, Casino est ainsi entré dans le capital du distributeur Vindémia à hauteur de 33,34 % pour un montant de 91,5 MEUR. Le groupe devrait notamment développer des synergies à l'achat entre le réseau thaïlandais de Big C et les points de vente de Vindémia localisés au Vietnam. Cependant, l'internationalisation de Casino a surtout été marquée par la volonté de consolider sa présence en Europe. La prise de participation dans le capital du second distributeur néerlandais Laurus en 2002 permet ainsi au groupe de rééquilibrer ses positions géographiques et de réduire les risques liés à sa présence dans des zones touchées par des difficultés économiques (Argentine…). Toutefois, le pari s'avère risqué pour le distributeur français dans la mesure où Laurus se caractérise principalement par ses 723 MEUR de dettes et ses 442 MEUR de pertes nettes. Aujourd’hui, la plupart des participations dans le capital des filiales étrangères demeurent inférieures à 50 % en 2001, et la montée de Casino en capital nécessitera d'importantes ressources dont le groupe ne dispose pas actuellement. La croissance de Casino est coûteuse en investissements et fragilise la structure financière du groupe qui affiche à nouveau un cash-flow fortement négatif Si Casino a affiché une forte progression de l'EBE (+ 27,4 % à 1 300 MEUR) et du résultat net (+ 2,5 % à 379 MEUR), cette croissance a été fortement consommatrice d’investissements aussi bien en croissance interne qu’en croissance externe. Malgré le coût d’arrêt aux acquisitions, le cash-flow opérationnel est tombé à – 646,5 MEUR après un – 408,3 MEUR en 2000. Parallèlement, la structure financière demeure lourde, les opérations de croissance externe réalisées depuis 1998 l'ayant sollicité. En 2001, Casino est toutefois parvenu à renforcer sa structure financière par le biais d'une augmentation de capital. Le taux d'endettement a ainsi reculé de 18,6 points à 75,4 %, ce qui est en soi un seuil acceptable. Néanmoins, le désendettement apparaît comme une priorité car la capacité de remboursement est nulle. La contrainte financière qui s’exerce est telle qu’elle va nécessiter des arbitrages dans les choix stratégiques, remettant en cause un plan de développement ambitieux et coûteux mêlant rénovations lourdes, ouvertures de magasin, internationalisation…
Ces choix devront d’autant plus s’opérer que le groupe va évoluer dans un contexte conjoncturel plus difficile notamment en France. Au premier semestre 2002, le groupe a observé un net ralentissement de croissance puisque le chiffre d'affaires progresse de 6,3 % par rapport au six premiers mois 2001 (à 11 021,7 MEUR), ce qui apparaît nettement inférieur au + 23,8 % enregistrés au premier semestre 2001 mais supérieur aux performances de certains concurrents (– 1,1 % pour Carrefour). Cette évolution
reflète notamment un effet de change négatif lié à la crise économique en Amérique latine. A taux de change constant, le chiffre d'affaires progresse ainsi de 9,4 %. En France, l'évolution des ventes confirme l'essoufflement des hypermarchés (+ 3,7 %) et le dynamisme des magasins discount (+ 14,1 %) et des supérettes (+ 6,3 %).
En dépit du ralentissement, Casino demeure l'un des groupes les plus dynamiques et novateurs du secteur et tire aujourd'hui profit d'un positionnement multiformat qui lui permet de mieux résister à l'essoufflement des hypermarchés. Pourtant, le tassement des ventes observé sur certains marchés et le manque de visibilité quant à l'évolution de la consommation rendent les objectifs de croissance annoncés au premier trimestre 2002 (+ 10 % par an pour le chiffre d'affaires, + 20 % pour le résultat net) incertains (même s'il s'agit de taux moyen sur la période 2001-2005). Par ailleurs, l’acquisition de Laurus et la fermeture de la centrale d'achat Opéra font apparaître de nouveaux
chantiers.
Casino poussé à renouveler le concept de l'hypermarché
26 juillet 2001
par
Les Echos Etudes
Les Echos Etudes
26 juillet 2001