Avec des taux de croissance à deux chiffres sur la période 2012-2016, tant en valeur (+19 % en moyenne annuelle) qu’en volume (+26 %)[1], le marché des biosimilaires en médecine de ville affiche un dynamisme certain, qui contraste fortement avec l’ensemble du marché remboursable. En tête des ventes, figurent les trois spécialités de Sandoz, Zarzio® (filgrastim), Omnitrope® (somatropine) et Binocrit® (époétine alfa). Avec plus de 62 % de part de marché en valeur, la filiale du groupe suisse se place comme le leader incontesté des biosimilaires sur le marché officinal.
Cette forte croissance devrait s’accélérer dans les cinq années qui viennent grâce à l’arrivée de nouvelles molécules dont les princeps vont progressivement tomber dans le domaine public. A commencer par les anticorps monoclonaux Humira® (adalimumbab) et Lucentis® (ranibizumab) dont les brevets arrivent à échéance en Europe respectivement en 2018 et 2022. En mai 2016, dix ans après la mise sur le marché du premier biosimilaire européen, on dénombrait 21 médicaments homologués par l’EMA. Ils sont aujourd’hui 29 et 16 sont en cours d’évaluation[2]. Les acteurs leaders anticipent donc un taux de pénétration des biosimilaires de l’ordre de 30 % d’ici 5 à 10 ans et un potentiel d’économies de plusieurs dizaines de millions d’euros par an pour l’Assurance-maladie.
Un objectif ambitieux car cette bonne dynamique ne doit pas masquer la taille encore très modeste de ce marché, estimée en 2016 à 107 MEUR et à moins de 1,1 million d’unités vendues, selon les estimations du GERS. Soit moins de 3 % des ventes de biomédicaments réalisées sur le marché « ville ». Une situation qui s’explique par de nombreux freins spécifiques à ce marché : sa relative « jeunesse », les réticences de nombreux médecins à l’égard de ces médicaments, leur connaissance parfois insuffisante de leur existence et de leurs modalités de prescription[3]... et surtout le flou (voire le vide) juridique qui entoure les modalités d’interchangeabilité et de substitution, entre princeps et biosimilaires et entre biosimilaires eux-mêmes. Rappelons que depuis la LFSS de 2014, l’octroi du droit de substitution permet aux pharmaciens de substituer un médicament biologique de référence par un biosimilaire, à condition que figure sur l’ordonnance la mention expresse du prescripteur « à l’initiation du traitement », que le pharmacien en informe le prescripteur et qu’il renseigne le dossier pharmaceutique du patient. Ces nouvelles dispositions ont suscité de nombreuses interrogations quant aux modalités de leur mise en œuvre, ce qui explique que le décret d’application ne soit toujours pas paru, plus de trois ans après... Au-delà des arbitrages attendus du ministère de la Santé et d’une politique publique clairement définie en faveur des biosimilaires, se pose la question même de l’adhésion des médecins au principe de substitution, sur un marché qu’ils considèrent d’abord et avant tout de prescription. Les débats autour de cette question rappellent ceux qui ont nourri il y a plus de 15 ans les polémiques entre les deux professions, au moment de l’octroi du droit de substitution en faveur des génériques...
[1] Source : GERS (données sell-in).
[2] A fin avril 2017.
[3] Voir à ce propos le guide d’information de l’EMA, publié en avril 2017 et réalisé en coopération avec la Commission européenne, destiné à fournir aux professionnels de santé des informations de référence, à la fois scientifiques et réglementaires, concernant l’utilisation de ces médicaments.
Pour aller plus loin, consulter la nouvelle étude réalisée par Les Echos Etudes en suivant ce lien :
https://www.lesechos-etudes.fr/etudes/pharmacie-sante/biosimilaires/